DÉLIA BOIVIN est née à Chambord le 25 octobre 1880. Elle eût pour marraine Sara
Turgeon et pour parrain Charles Gagnon demeurant tous deux à Chambord.
Cinq enfants l'avaient précédée dans la famille : les jumelles Léda et Amanda, Zénaïde et
Philomène. Ses parents, Elzéar Boivin et Louise Morin, demeuraient sur une ferme dans
la partie ouest du village de Chambord non loin de la maison des grands-parents Boivin. La famille y
demeure environ dix ans alors qu'elle partira pour Montréal s'établir dans le quartier
Hochelaga et rejoindre les jumelles qui y travaille depuis quelque temps.
À L'ÉCOLE CHEZ LES RELIGIEUSES
Tout comme les plus vieilles, Zénaïde et Philomène travailleront afin de subvenir eux besoins
de la famille vue que leur père est malade. Alice, la dernière de cette famille est née en 1892
et fut baptisée dans l'église de Notre-Dame de Grâces. Délia fréquente alors une classe où les
Soeurs de Jésus et Marie venaient chaque jour donner l'enseignement aux enfants de cette
paroisse. Le dévouement de ces bonnes religieuses auprès des fillettes du quartier
Hochelaga contribue à leur faire découvrir la grandeur de la vocation. Délia ne fut pas
insensible à cet attrait nous dit-elle. Serait-ce ce contact qui aurait fait naître en elle la noblesse
des convictions religieuses qui l'ont caractérisée au cours de se vie?...
DANS LES FILATURES
De nouveau, la famille quittera Hochelaga pour les États-Unis où le travail est plus rémunérateur.
C'est dans la paroisse de
St-Augustin de Manchester que logera alors la
famille Boivin.
Le père étant presque toujours malade, c'est avec le gain des enfants que subsiste la famille.
Les jumelles Léda et Amanda, Zénaïde et Philomène travaillent dans les filatures et Théophile
dans une manufacture de chaussures. Quant à Délia, elle se souvient d'avoir préparé les
bobines devant servir au tissage; seule Marie va à l'école anglaise.
Cependant cet exil accepté, afin de pourvoir à la subsistance familiale, a contribué à créer
des liens entre les nombreuses familles canadiennes demeurant aussi à Manchester.
C'est ainsi que Léda et Amanda puis Zénaïde uniront respectivement la famille Boivin à
celle des Dion, des Bernard et des Lapointe par les liens du mariage.
RETOUR À SAINT-FRANÇOIS-DE-SALES
Vers 1898, la guerre hispano-américaine obligent la famille Boivin à revenir au Canada
et c'est à
Saint-François-de-Sales, sur une ferme non loin du village, qu'elle demeurera
maintenant. Léda et son mari Hector Dion resteront à Manchester, Zénaïde et Ligori Lapointe
iront à La Malbaie, Amanda et Léo Bernard s'établiront à Saint-François-de-Sales.
La famille Boivin habite une maison primitive et rustique, construite pièce sur pièce,
à peine terminée. Elle a pour décor extérieur les trembles et les épinettes qui l'encerclent.
Ils font haie aussi le long du chemin aux roulières cahoteuses, montent vers le village ou
descendent vers la Cavée.
Paysage plein de charme certes mais dont le calme sera reposant
pour ces parents déjà usés par les multiples déplacements et les soucis de la vie.
Théophile, le seul garçon de la famille, s'occupera des travaux de la ferme et travaillera aussi
sur le chemin de fer.
RENCONTRE D'ÉMILE
Au cours
d'une promenade chez la soeur de sa mère, tante Obéline Morin, dont le
mari Alfred Denault est gardien du club de pêche
Stadacona le long du chemin de fer du Lac-St-Jean,
Délia y fait la connaissance de Émile Bouchard.
Il est né le 21 mai 1878 à Baie-St-Paul. Il a un physique
attrayant; c'est un homme actif, adroit et très jovial. Il est, lui-aussi, en visite mais chez
son frère aîné, Joseph Bouchard, un sectionnaire qui travaille et habite à cet endroit avec
sa femme Ozélina Déry et ses enfants.
Émile demeure chez ses parents à Beaudet non loin de là et travaille aussi
sur le chemin de fer.
Son père est Elzéar Bouchard, un commerçant de bois, et sa mère,
Louise Danielson/Donaldson.
LA FAMILLE ELZÉAR BOUCHARD
Elzéar et Louise ont quitté Baie-St-Paul avec leur
famille pour s'établir à Beaudet afin de participer à la construction du chemin de fer
du Lac-St-Jean qui a débutée en 1886. Le paternel a acheté une terre en 1888
près du pont de Beaudet où la
maison ancestrale très bien préservée jusqu'à aujourd'hui (Photo à droite),
peut encore être vue par les passagers du train Montréal-Chambord.
Lors du recensement de 1901, Joseph, le frère d'Elzéar, est également établi à
Beaudet avec sa famille où il est le gardien du club de pèche Jacques-Cartier.
MARIAGE DE DÉLIA ET ÉMILE
Émile et Délia se marièrent le 13 août 1900 en la petite église de
Saint-François-de-Sales dont la construction était commencée. Le curé Bilodeau de Lac-Bouchette vint les marier ici à la
mission et ce fut l'oncle Abraham Bilodeau, alors maître-chantre, qui organisa l'église pour
la circonstance. Les pères et mères des jeunes époux étaient présents.
LA VIE SUR LE CHEMIN DE FER
C'est à Beaudet qu'ils ont demeuré après leur mariage et à St-Tite ensuite.
Là naquit leur premier enfant, un garçon, qui n'a pu survivre.
La maman de Délia, Louise Morin, était venue passer
quelques semaines à St-Tite à cette occasion.
Malgré le beau paysage qu'offrait le
village de Ste-Tite, le couple s'ennuyait. Ils revinrent à Beaudet
où toujours Émile Bouchard était «foreman» sur ces
sections du chemin de fer. Il a pour
compagnons de travail, Noël Harvey, Pitre Turgeon et plus tard son beau-frère Théophile Boivin.
LES ACCOUCHEMENTS
Lorsque la cigogne s'annonçait, maman Bouchard se rendait, par le train, à Saint-François-de-Sales
chez ses parents où elle passaient quelques semaines de convalescence. Elle eut
l'avantage de bénéficier des bons services de sa soeur Philomène (Photo de gauche)
qui encore célibataire, demeurait presque toujours avec eux. Aussi, les enfants trouvèrent-ils
en elle une seconde maman tant elle les affectionnait et leur prodiguait son empressement.
L'INCENDIE DE LA MAISON
À la naissance de leur fille
Anita, en mai 1903, pendant que Délia se trouvait à
St-François-de-Sales, un incendie le long de la ligne détruisit leur campement.
C'est de justesse que Philomène fut transportée en sécurité par les sectionnaires
qui s'y trouvaient. Ils ne purent rien sauver et dans ce départ précipité Philomène
avait oublié d'apporter le petit porte-monnaie qui contenait ses modestes économies.
C'est par la précieuse intervention du
Curé Gingras, ami de la famille Elzéar Bouchard,
qu'ils reçurent gratuitement de certains bienfaiteurs de Québec des meubles, des
vêtements, des couvertures et des articles de cuisine afin de compenser ce qu'ils
avaient perdu dans l'incendie.