20 novembre - Le Taj Mahal
5h15. Il faut se lever très tôt pour être dans les premiers au Taj Mahal et éviter d'attendre pendant des heures en file. Départ en mini-bus pour le stationnement du Taj Mahal et marche ultra rapide pour faire la queue devant la billetterie. Nous voulons être les premiers à entrer!
Mai près de 200 personnes sont déjà là en 2 rangées qu'un fonctionnaire en uniforme vérifie constamment: les hommes d'un bord et les femmes de l'autre. Raymonde combat ardemment les imposteurs qui osent s'infiltrer parmi nous: «Hey là vous autres! Pas question! Faites la queue comme tout le monde!» qu'elle leur dit dans son plus bel Hindi. L'effet tonal est tellement impressionnant que personne n'ose par la suite défier son autorité!
Froid matinal
C'est pas mal frais, même «frette» selon les madames! Je suis bien avec ma chemise à manche courte... du moins c'est ce que je leur dis mais ce serait très peu macho de leur avouer que je leur envie leur grands foulards (des pashminas d'après une source très bien informée) dont elles se drapent les épaules et qu'elles ont mis des heures à magasiner ces derniers jours avec une joie que seule une autre femme peut comprendre.
Les contrôles de sécurité
Les guichetiers arrivent à 5h50, 10 minutes avant l'ouverture, et débutent méthodiquement leur sinécure, le tamponnage de billets étant un grand classique du travail de masse en Inde! Même si quelques guides indiens parviennent à passer devant nous pour faire valider les billets de leurs clients «VIP», Daniel et Mohamed, le même guide local qu'au Fort Rouge hier, résistent et nous voilà nous aussi à l’intérieur.
Les restrictions
En fait, nous n'avons accompli que l'étape la plus facile car franchir le poste de sécurité et ses détecteurs de métal est en lui-même un événement très stressant: tout est interdit et seules les caméras et les batteries sont permises. Toute forme de nourriture est proscrite et on confisque toutes les bouteilles d'eau en notre possession... pour nous en donner une autre gratuitement! Parmi les restrictions étonnantes on spécifie que «les crayons à papier et les crayons de couleurs» sont interdits mais pas les stylos à encre, peut être pour éviter que les gens écrivent des graffitis sur le marbre du Taj Mahal.
François a le malheur d'avoir sur lui un objet que le soldat ne reconnait pas: «Confisqué!». Mohamed réussi à le convaincre de lui remettre ladite arme de destruction massive pour qu'il la confie à un ami propriétaire d'un commerce tout près. C'est OK. Le minuscule trépied de caméra très design de François ne verra jamais le Taj Mahal!
Passé les murailles entourant le site du Taj Mahal, nous voici devant l'énorme porte monumentale toute de grès rouge construite sur laquelle deux rangées de 11 coupoles rappellent les 22 années de labeurs que des milliers d'artisans et d'ouvriers on mis à construire ce monument à l'amour. Cette porte majestueuse rappelle déjà les incrustations fines et détaillées que nous allons voir dans le Taj Mahal.
Visite du Taj Mahal
C'est dans le porche de cette porte que nous voyons en perspective le majestueux Taj Mahal encore embrumé dans la fraîcheur matinale. L'émotion est à son paroxysme et nos cœurs battent la chamaille! Le Taj Mahal, majestueux, apparaît au fond d’un superbe jardin, nimbé des toutes premières lueurs de l’aube. Les minutes qui vont suivre vous seront très certainement décrites avec force détails dans les émotions par nos compagnes. Je vais donc me contenter de vous livrer les «émotions» ressenties par un ingénieur en mécaniques devant ce monument extraordinaire.
Le Taj Mahal est construit sur la rive de la rivière Yamuna et entouré de jardins magnifiques où la hauteur des arbres est contrôlée afin de diriger les regards vers la blancheur laiteuse de l'édifice. Un grand rectangle d'eau faisant parti d'un ensemble de fontaines, permettait de refléter le Taj Mahal. Je suis déçu de voir qu'on n'est pas parvenu à contrôler la limpidité de cette eau de sorte qu'aujourd'hui, aucune des nombreuses fontaines ne contient d'eau. Pour un ingénieur, c'est un anti-climax: tu construis une Ferrari mais sans la peindre en rouge. Very shocking!
Mon dieu qu'on a pris des photos: en groupe, tout seul, avec Raymonde, en amoureux, en extasié... tout y passe. Certaines personnes sont plus loufoques que d'autres et vont jusqu'à mettre le doigt sur la pointe de la coupole du Taj. J'avais fait quelque chose de semblable à Pise en poussant du doigt la tour penchée pour la redresser. Very amazing!
Soudain, le soleil perce la brume pour ajouter une teinte jaune au marbre laiteux du Taj. Combien de click de caméras en ce moment précis? À peu près autant que lorsque le premier mineur a été sorti de son trou l'autre jour au Pérou. Very interesting indeed!
Les tombeaux
Parvenus à l'esplanade surveillée par des soldats en arme, nous mettons des couvres-chaussures en tissu synthétique pour ne pas érailler les dalles de marbre sur lesquelles nous allons marcher. Des minarets ont été érigés sur chacun des coins de l'esplanade mais ils penchent légèrement vers l'extérieur, l'architecte ayant prévu qu'ainsi ils ne s'écrouleraient pas sur le Taj Mahal advenant un tremblement de terre.
L'utilisation des flashes et des caméras est totalement interdites à l'intérieur du mausolée - on le fait en cachette! - dont la visite est émouvante mais décevante car tout est dans la pénombre, une minuscule lampe parvenant difficilement à éclairer les tombeaux de Shah Jajan et de son épouse Mumtaz réunis ici pour l'éternité.
Fait étrange, le seul élément non-symétrique du Taj Mahal est cette tombe de son constructeur placée près de celui de son épouse bien-aimée qui vient briser l'harmonie des lieux. Shah Jahan avait pourtant prévu un mausolée de marbre noir pour abriter sa dépouille mais son fils, le méchant Aurangzeb, n'a pas exaucé son voeu.
Incrustations de marbre
Pendant la visite je m'extasie cependant devant les incrustations de pierres précieuses et semi-précieuses qui ornent pratiquement tout le marbre exposé. C'est tellement fin et délicat que je me demande si c'est encore possible aujourd'hui de refaire un tel travail. Je m'étais posé jadis la même question en visitant l'intérieur de St-Pierre de Rome où l'ingénieur en moi avait calculé le coût en «stades olympiques de Montréal» d'une reconstruction à l'identique. Aujourd'hui, c'est en «CHUM de Montréal» que je ferais l'évaluation du temps de reconstruction du Taj Majal tellement cela prendrait de temps à se faire : une éternité !
Atelier d'incrustation
La visite terminée, nous repassons à l'hôtel vers 9h30 pour y déjeuner à un très bon buffet. Ensuite, Sanju charge nos valises dans le mini-bus et nous amène dans une boutique d'artisanat où nous pouvons voir de nos yeux qu'il se fait encore aujourd'hui des oeuvres d'art aussi belles que celle que nous avons vu au Taj Mahal! Moi qui croyait que l'incrustation de marbre était un art perdu à jamais!
On y voit des artisans tailler minutieusement des plaquettes de marbre coloré et des pierres fines sur des tours manuels alors que d'autres sont à buriner et creuser des cavités dans les plaques de marbre pour recevoir ces pièces. Il faut modifier et polir de nombreuses fois les différents éléments pour pouvoir les ajuster parfaitement. Les différentes couleurs des veines des pierres fines et des plaquettes de marbre sont judicieusement choisies pour reproduire la structure naturelle des feuilles et des fleurs. Un travail de moine! Le résultat est spectaculaire tout comme le prix de ces objets d'art!
Dîner sur la route vers Bharatpur
11h30. Nous voilà enfin partis pour Bharatpur. Pendant le trajet, nous avons droit à une leçon d'astrologie de la part de Raymonde qui s'y connait passablement dans ce domaine! Même les sceptiques se surprennent à s'intéresser à ses paroles et les discussions vont bon train.
Vers 13h00, nous arrêtons dîner à l'extérieur d'un petit restaurant routier sous un large parasol de nylon bicolore qui nous abrite du soleil. Le gérant ou propriétaire est là pour nous accueillir. On se croirait dans un film. Tous les plats de service en métal gris argent, comme au Château Frontenac, les serveurs en livrée noire et blanche sont attentifs à nos moindres besoins. Et la bouffe est bonne! C'est magique! Souvent il n'en faut pas beaucoup pour transformer un repas simple en quelques chose d'extraordinaire et mémorable!
BHARATPUR
Nous atteignons Bharatpur vers 14h30. Notre hôtel, situé en bordure de l'autoroute n'a de palace que le nom! Histoire à suivre!
Le Parc Keoladeo
Le reste de l'après-midi fut consacré à la visite en bicyclette du parc national Keoladeo pour y voir de multiples oiseaux, surtout aquatiques, mais aussi des antilopes et de grosses tortues «mangeuses d'hommes». C'est du moins ce que notre guide local nous a dit en nous prévenant de ne pas chuter à l'eau car... Ça ajoute du piquant à l'excursion et ça fait de quoi à raconter car moi, mon «hostie» de becyque, j'en avais plein le cul! Une disgrâce totale pour un ancien coureur cycliste des années 60 comme moi!
La selle était trop basse et impossible à ajuster de sorte que j'ai fait 2 heures de tape-cul assis pratiquement sur l'aile d'en arrière. Les poignées étant trop basses, je devais pédaler avec les genoux à l'extérieur - en position de yoga - pour éviter de me faire des bleus en frappant les poignées. Finalement, au retour, mon garde-chaîne a rendu l'âme - un boulon dans ce cas-ci - et ce fut dans un tintamarre indescriptible que je suis revenu à la ligne de départ la chaîne frottant directement sur la tôle du foutu bidule mal attaché.
Faut dire que ce fut un mal pour un bien car, devant moi, tous les usagers de la route m'entendaient venir à 1 kilomètre et s'écartaient pour laisser passer le «véhicule d'urgence» qui s'en venait! C'est le seul bon coté de la chose! Very, very, very embarrassing moments for me indeed!
J'aurais dû faire comme Raymonde et Clôde et prendre un rickshaw! Leur pédaleur, Kalou, était hyper sympathique et gentleman. Elle sont beaucoup ri de ses remarques pertinentes teintées d'une touche d’humour comme « Les amours des oiseaux rechauffent leurs nids! ».
Oh! L'ai-je mentionné ? On a vu des oiseaux, des antilopes et des tortues «mangeuses d'homme». Mais ça c'est une autre histoire sans grande importance car moi, ce qui m'a marqué, c'est la selle de la bicyclette que j'ai incrustée dans le croupion et ça fait encore mal!
Le Pratap Palace Hotel
Ce soir, notre hôtel est «cozy» et familial. Il se nomme Pratap Palace. Faut pas être complexé pour donner un nom pareil à son hôtel quand il est situé sur le bord de l'autoroute et qu'il n'a rien qui le distingue spécialement des autres édifices autour.
Même la «swimming pool» annoncée en grandes lettres sur le panneau réclame n'a rien de vraiment invitante avec son eau croupie envahie par les algues. Mais on y travaille car je vois des outils près des équipements de filtration rouillés et en piètre état. Un pouce de poussière les recouvre cependant ce qui fait plutôt croire à une inéluctable résignation des gens de l'entretien quant à la possibilité de la remettre en marche d'ici les 5 prochaines années.
Le bon coté de la chose étant....
Le proprio est très gentil et au devant de tous nos besoins. La chambre est propre et grande. À coté, une grande salle où dorment les employés. Nous sommes tous satisfaits même si on a pas Internet car la nourriture est bonne et la bière Kingfisher Extra Strong coule à flot ici! Longue vie à Bharatpur la dépravée! Choooooouuuuuu à Varanasi, la ville sainte, prude et sans alcool!