7 décembre 2010 – Delhi
Dès notre arrivée à l’hôtel, Claire et moi filons en vitesse au coin de la rue dans le bouiboui où elle a acheté sa datakey internet qui n’a jamais fonctionné du voyage. Elle réussi facilement à se faire rembourser et, comme je veux m’en faire installer une qui fonctionne, elle averti le jeune technicien sikh de me donner un meilleur service qu’elle n’en a reçu. Elle me quitte pour aller à la rencontre avec le représentant de notre seconde partie de voyage et pour le souper de fin de voyage.
L’échoppe dans laquelle je me trouve est minuscule : du coté droit, deux minces comptoirs derrière lesquels mon technicien en turban sikh avec pommeau au front travaille et un commis ordinaire, sans turban, qui s’affaire à aider tout le monde et de temps en temps à renseigner les clients sur les innombrables appareils électriques et électroniques de toutes sortes qui meublent les tablettes derrière eux… dont la fameuse Internet Datakey Tata Photon qui fait mon envie.
Au fond de la pièce, deux autres comptoirs où deux vieux messieurs aussi en turban sikh s’évertuent à ne rien faire en buvant du tchai tout en écoutant les interminables jérémiades d’une foule de personnes qui vont et viennent dans la pièce. Le long du mur gauche, cinq tabourets permettent aux clients comme moi d’attendre d’être servis.
Après avoir réussi à installer le logiciel de la datakey sur mon mini-pc, le jeune technicien en turban à pommeau la met en marche mais me dit aussitôt : «What it says?» Ah, merde, mon ordinateur est configuré en français et il ne comprend pas le message d’erreur.
«Error 2863: Computer cannot find modem»
Il se gratte la tête sous le pommeau du turban et reprend l’installation. Mais on le dérange constamment car il est aussi celui qui recharge les cartes à puces des cellulaires: moyennant quelques roupies, il assigne quelques minutes de plus au cellulaire du client en pitonnant sur son propre cellulaire. 30 secondes pas plus. Rapide et efficace! Il se re-concentre à trouver mon problème et à nouveau : «What it says?» Encore une fois je lui traduit :
«Error 1637: No modem connected to computer».
À voir la face qu’il fait, je pense que la nouvelle n’est pas bonne. Il se tord la barbe en tous sens d’une main tout en pitonnant de l’autre sur le clavier. Le pommeau de son turban s’est soudainement affaissé pour une raison inconnue et il prend quelques instants pour lui redonner la forme requise. Probablement une perte d’énergie cosmique!
Nouvelle tentative :
«Error 1892: Distant computer not found».
Nouvel échec suivi par l’urgence de brancher l’ordinateur sur le courant car la pile est a zéro. Les minutes passent. Il est tellement résolu à trouver le problème que je ne vois plus que le pommeau de son turban au dessus du comptoir. Je me lève pour vérifier s’il ne s’est pas endormi sur son établi. Mais non : il a la tête entre les mains et les coudes sur la tablette et fixe intensément l’écran du mini-pc. Soudain, l’alimentation électrique de l’immeuble disjoncte! Plus de courant! Ça fait 3 heures que je poireaute sur mon tabouret et je veux m’en aller. Depuis une heure que je chercher une raison pour foutre le camp d’ici et aller rejoindre mes amis au resto Spicy by Nature à un coin de rue de là. Ils sont certainement rendus au dessert.
«What it says?» L’ordinateur vient à nouveau de lui envoyer un message d’erreur en français. Je profite donc de la panne de courant pour lui inventer une traduction de mon cru et pas mal tordue :
«It says : Error 3210: Computer no more juice!»
Il me regarde, incrédule!
«And me too, no more juice!» que je lui dis en lui faisant comprendre que sa datakey il peut se la mettre sous le pommeau de son turban qu’elle ne fonctionnera pas plus. Ça me fait vraiment de la peine pour lui car il a tout fait pour que ça marche pis c’est un bon gars.
Il comprend que c’est peine perdue. Nous nous serrons donc la main et je quitte avec mon mini-pc sous le bras pour rejoindre mes amis, qui, effectivement, en étaient à discuter dessert.
Parlant dessert, la soirée s’est finalement terminée dans la chambre de Daniel pour y déguster les dernières barres de chocolat de François qu’il ne pouvait décemment ramener au Québec sans les partager d’abord avec ses nouveaux amis! Au revoir François! Tu es un gars super attachant et nous avons tous apprécié ton érudition et ton sens de l’humour! Ensuite, en notre absence, ce sera au tour de Richard, notre physicien et connaisseur de vin, qui retournera retrouver sa Claire, affectée par le décès de sa mère survenu quelques heures plus tôt.
Demain, c’est nous qui quittons pour Mumbai pour entreprendre notre second mois de voyage.
Namaste!