16 février – lundi
Nous quittons avec bonheur cet hôtel où la chambre était bien mais la salle de bain, je ne pouvais même pas m’y laver à force qu’elle était répugnante. Je vais mettre 2 photos qui résument très bien l’état de cette pièce insalubre.
Nous prenons notre petit déjeuner dans une grande salle à manger où 4 jeunes hommes semblent travailler pour une entreprise, car ils sont habillés dans des vêtements identiques. Ça sent tellement le naphta que je me dépêche de sortir une fois le repas terminé. Étant trop tôt pour partir, Pascal et moi allons marcher pour explorer un peu le village de Bajawa.
Arrivés à une intersection, des hommes en moto rient et nous regardent en faisant des commentaires que je préfère ne pas entendre. Ils sont comme une meute gardant leur territoire de toute intrusion étrangère. En plus, j’ai remarqué que depuis que nous sommes à Flores, les hommes et certaines femmes crachent beaucoup et s’essuient la bouche avec la manche de leur chemise. Je crois que c’est propre aux musulmans.
Ce matin, en voulant me connecter à Facebook j’arrive sur le site d’Efendy qui montre des choses horribles que les nouvelles diffusent sur la mise à mort d’étrangers. Je réalise comment ces rites animalistes amènent à banaliser sans doute cette manière de mettre à mort leurs semblables. Le sens de la mort est tellement différent d’une religion à l’autre, d’une croyance à une autre et d’un pays à un autre.
Au début de notre voyage, Andréan parle de nous faire connaître les sources thermales de Bajawa. Nous mettons nos costumes de bain dans notre petite valise bleue. La publicité disait que si vous en avez marre du froid, que vous avez des maladies de peau, ou que vous voulez tout simplement souffler un peu, vous pouvez vous rendre aux sources thermales de Mangeruda. Le cadre est juste idyllique et l’atmosphère apaisante : on profite de l’eau chaude qui coule d’une rivière à l’ombre des cocotiers. Plusieurs piscines artificielles ont aussi été créées pour le plaisir des visiteurs.
Mais voilà que Denis est malade (le chauffeur). Il ne mange pas et nous partons. Je demande à Andréan quand utiliserons-nous nos costumes de bain pour nous baigner dans les eaux thermales. « Comme je vous expliqué hier, on n’y va pas »! Hein? On n’y va pas? Non, non! Ben là!! Il y a une mésentente. Il dit qu’il nous l’a bien expliqué hier. Je réponds : 2 ou 3 mots ne servent pas d’explication. Je n’ai absolument rien compris de tout ça. Et Pascal ne dit rien!!! Pourtant, ce matin, il était bien d’accord que nous mettions nos costumes de bain dans la petite valise afin de se changer aux sources thermales. Bon! Oublions tout ça et on continue à regarder les beautés qui nous entourent.
Andréan est très peiné de ma réaction et de savoir que je suis déçue. Bien, imaginez-vous que moi aussi je suis très déçue. C’est tout!
Il nous parle de cette phrase qui résume bien l’unité des différentes religions qui cohabitent en Indonésie : « Nous sommes différents, mais nous sommes un ». Peace and Love s’applique bien à ces provinces tellement différentes l’une de l’autre mais combien la paix et le partage détrônent le danger de haine et d’incompréhension afin de garder ce pluralisme ethnique unifié.
Je trouve que l’odeur dans l’auto ne sent plus tellement le durian, pourtant hier, ça puait! On roule et à coup, Andréan nous dit qu’il a donné le durian à un ami de la famille qui va le remettre à sa sœur enceinte en manque de ce fruit. Il est très généreux et sensible notre Andréan.
Nous partons de la montagne pour descendre vers la mer. Andréan conduit car Denis a été malade et il n’est pas en état de conduire. Je crois qu’après quelques minutes, il regrette déjà d’avoir laissé le volant à son beau-frère, notre guide. Je suis bien d’accord avec Denis. Les paysages défilent d’une beauté sauvage et en échangeant, Pascal et moi, nous trouvons que la forêt ressemble beaucoup à une forêt humide « rain forest ». Ce que nous confirme Andréan passionné de botanique en parlant de la forêt qui nous entoure.
Nous arrêtons pour comprendre comment se produit l’alcool du pays : l’arak. J’en ai déjà parlé dans un blogue de fin janvier. La différence se situe dans la sorte de graine utilisée pour le produire à Flores. C’est tellement artisanal que je me demande comment il peut en sortir de l’alcool aussi pur et aussi bon. Il goûte le sake.
Andréan vient de la région où nous sommes. Il arrête prendre des noix de coco chez son père Benjamin qu’il nous présente ainsi que sa mère Maria Garotti. Son père est âgé de 64 ans et sa mère de 54 ans. Elle est belle cette dame. Suit la sœur de son mère, sa tante et les voisines qui passent en saluant de la main en émettant de petites phrases courtes soulignées de sourire de bétel. Ces dames portent le panier sur le dos à lequel est attachée une longue corde ceintrant leur tête. Elles ont donc les mains libres pour apporter des légumes ou autres choses, selon leurs besoins.
Denis reprend le volant! Youpi! Malgré la bonne volonté d’Andréan d’aider le malade, sa conduite nerveuse est surprenante et saccadée. Il nous demande si tout va bien! Oui, oui! Bon!
Andréan a un autre frère de 34 ans qui habite un peu plus loin. Il demande si on peut arrêter pour manger la noix de coco avec eux. Bien oui! Avec plaisir! Nous ignorons alors que nous y resterons trois heures.
Le petit village de Tango où nous vivons ces trois heures en famille composée de Rénie la femme de Ferdinand, le frère d’Andréan, ses deux filles Alexandra et Mathilda, Lily sa sœur qui aide à préparer le dîner, une autre sœur de Rénie dont j’ai oublié le nom, le père de Rénie qui tient Alpha dans ses bras, le fils de Lily dans un va-et-vient continuel. Ferdinand et Rénie tiennent un « cafe shop ». Petit bouiboui qu’on peut facilement manquer si on baille en passant. Mais quel site enchanteur.
Ferdinand accepte de nous offrir le dîner mais il faut acheter le poulet. Je donne 100 000 rupiahs (10$) et je désire offrir le repas à toute la famille. Il part en moto avec Mathilda pour aller acheter le poulet. J’imagine que ça sera du poulet frit comme dans les restos du coin. Il revient avec un poulet frais pas vidéééé! Sa femme nettoie l’intérieur du poulet en gardant les pièces qui le compose et qu’elle dépose dans un plat. Sans doute pour le chien magnifique et son bébé qui trottinent autour de la cuisine.
Je m’assoies face au paysage en attendant que tout soit prêt. Rénie vient me chercher sur demande d’Andréan qui veut me montrer comment il aime cuisiner. Avec ses mains, il étend dans le poulet ouvert en deux, une pâte d’épices, d’ail, de piment et d’échalote française broyés par Rénie. Ça sent drôlement bon. Ferdinant lui coupe deux morceaux de bois en pointe afin de l’embrocher pour le faire cuire. Comment ça le faire cuire? Ça prend au moins une heure! Nous pensions être arrêtés que quelques minutes afin de boire l’eau de coco, manger sa pulpe et déguerpir. Non, non! Une belle expérience pour vous de vivre ce repas dans une famille locale. C’est vrai! En plus, tout le monde est tellement sympathique.
Un couple arrive que semble bien connaître Mathilda qui les accueille les bras ouverts. Ferdinand et Rénie portant son bébé dans une bande de tissus qui forme une sorte de panier maternel discutent avec le couple. Rénie semble être celle qui négocie et Ferdinand celui qui sert l’Arak tout en discutant. Il faut que j’ajoute que Ferdinand et Rénie vendent des fruits des agriculteurs du coin. J’achète donc une des trois sortes de bananes ainsi qu’un ananas qui nous serviront de souper ce soir.
Tout à coup, je vois Ferdinand partir avec « notre » voiture Toyota ainsi que ses deux filles plus vieilles. Ah! Oui! La première fille, j’ignore son nom mais elle est en 5e année primaire. Bon!
Deux heures sont déjà passées dont une seule demie heure pour la cuisson du poulet. Ça m’inquiète un peu. Mais vu qu’il cuit directement sur la grille au-dessus du feu de bois, je me dis que ça doit être plus rapide!
Andréan prépare une salade composée d’une sorte de concombre un peu suret dont on enlève les graines centrales. Lily avait déjà commencé cette salade. Mais non, c’est pas une salade. Dans de l’huile, il fait rôtir de l’ail, des piments, des épices et une fois le tout rôti, que vois-je? Il ajoute les tripes qui ont été lavées et coupé en rondelles, le cœur coupé en morceaux miniatures ainsi que les abats et même le troupion. Ensuite, lorsque toute cette préparation est bien rôtie, il y ajoute cette salade de concombre. Je peux vous dire tout de suite, que le chien va pouvoir bien manger ce midi. Je ne me gênerai pas pour le gaver de ces morceaux indésirables qui se trouveront dans mon assiette.
Nous sommes aux petits soins. Tout le monde participe à notre super confort. Andréan aidé de Denis qui se porte mieux traversent la route avec la table du resto pour l’amener du côté des montagnes où Pascal et moi admirons le paysage. Suivent les chaises en plastique empilées par deux car soit que le siège de l’une est cassé ou le dossier de l’autre est manquant, et en plus, ça fait plus solide. Les plats arrivent et je demande que nous mangions tous ensembles. Oui, oui dit Rénie qui s’éclipse une fois la table montée des plats qui répandent leurs odeurs fraîches de cuisson. Le riz est excellent et les légumes rôtis avec les abats sont tout simplement un pur délice. Le chien mangera quand même quelques morceaux inconnus de mes yeux scrutateurs. Quelle générosité.
Sur le 10$, Ferdinand me remet 4$. Je lui demande de les garder pour payer au moins les légumes et le riz. Il prend un 2$ mais refuse l’autre. Une fois qu’il est reparti, je le donne à la sœur de Rénie dont j’ai oublié le nom et qui est mère de trois enfants. Elle était ravie et elle me bénit de tous les noms que le ciel peut contenir. Elle me demande pourquoi je lui donne cet argent. Je lui dis, parce que ça reste dans la famille et que c’est ma manière de dire merçi pour toutes ces bontés. À cette condition, j’accepte madame. Et bizous, bizous!
Nous n’avons pas attendu le retour de Ferdinand pour manger. Face aux montagnes, nous ne mangeons que tous les quatre ensembles. Les autres se sont éclipsés car nous sommes des invités d’Andréan. Voilà Ferdinand qui arrive au volant de la Toyota, la musique à fond, ses filles sortent de la voiture le sourire fendu jusqu’aux oreilles. Excitées, elles expliquent à leur mère comment elles ont eu du plaisir à être avec leur père.
Nous faisons nos adieux après trois heures qui se sont envolées comme sur les nuages qui avancent sur nous pour tomber une demi-heure plus tard, un peu plus loin. Les caméras pleines de nos visages heureux d’avoir vécu du bonheur en toute simplicité mais avec combien de complicité.
Et je réalise comment la certitude d’un jour peut devenir une incertitude le lendemain. Ce qui m’amène à reconsidérer l’attitude d’Andréan que je trouve parfois bizarre qui est dû, je pense, à une grande sensibilité que je découvre aujourd’hui. Hier, je pensais que c’était plutôt une forme d’indifférence alors que c’est plus une protection pour ne pas avoir à se sentir coupable de pas être à la hauteur de nos attentes. Je me sens un peu coupable de mon attitude envers lui ce matin!
Pourquoi faut-il?
Les dangers publics : il n’y a pas assez des éboulements qui encombrent la route à un détour, des animaux qui traversent la route à un tournant, des courbes à 180o, des autobus bémos qui roulent à une vitesse incroyable qu’il faut éviter de justesse dans un lacet de courbes continues, qu’il faut que des hommes stationnent leur moto au beau milieu de la route pour les laver. Et oups! Il lave sa moto, des écoliers sont obligés de le contourner et nous arrivons en face de ce beau monde, car un véhicule vient en sens inverse. Avons-nous le temps d’arrêter! Ouf! Vite Rescue ma fille! Vive les gouttes homéopathiques!
La dernière constatation est que les gens apparaissent et disparaissent comme ça, soudainement. Comme une des sœurs à Rénie qui est arrivée de je ne sais d’où, je me détourne, elle est là! Nous échangeons, nous pratiquons son anglais, elle me dit qu’elle a un ami Canadien, Monsieur Dion qui habite ici depuis 10 ans. Pascal demande s’il a marié une indonésienne. Oui, oui! Est-ce qu’elle est jeune et lui vieux? Oui, oui. Mais il parle indonésien et il est très gentil et aussi très riche. Rénie vient pour la photo de nous trois ensembles. Je me détourne pour demander quelque chose à Pascal et en me retournant, plus personne! Elles ont disparues! Et je ne reverrai plus la sœur de Rénie. Incroyable! Pas de bonjour, pas d’au revoir, rien! Je suis partie! Pouf!
Vous dire comment j’apprécie notre chambre au Monastère des bonnes sœurs Santa Maria Berdukkacita. Grande chambre, salle de bain pratique et bien propre, une table où nous pouvons nous asseoir tous les deux pour écrire et souper de fruits frais, mais quel plaisir!
Une autre journée de vacance dans la différence!
Bizousssss